Ombrenfance
" Que dit-on, déjà, de l’enfant qui sommeille en chacun d’entre nous ? Qu’il ne meurt jamais, mais souvent s’assoupit ? Qu’il joue pour patienter aux osselets avec les ruines de nos certitudes ? Ou qu’il espère encore quand nous buvons déjà la lie de l’avenir ? Qu’il regarde le monde à travers notre peau devenue diaphane sous l’éclat du désir ? Qu’il entend malgré lui notre voix qui ne lui ressemble plus ? En vérité, prisonnier que de lui-même."
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Extraits
Tapi dans les sous-bois de nos chambres bouclées, le loup nous tutoyait en souriant ; nous n’avions d’autre choix que la fuite, bien que nos jambes eussent la paresse de l’herbe longue ; nous ne dormions que d’un œil, tandis que l’autre gambadait inconscient sous la noirceur de nos lits trop étroits ; si la nuit un bestiaire fabuleux imprimait nos paupières, nos bras disparaissaient en cherchant une lumière qui n’avait pour visage que celui de la fraîche solitude ; c’était à l’aube que les spectres venaient, et soufflaient sur nos draps pour en faire des baillons, la froideur du baiser congelant l’épouvante à nos lèvres ; nous tombions amoureux de nos peurs au point de les marier, comme les rêves quand ils perdent mémoire et reviennent sur leurs pas ; notre cœur seul continuait à s’ébattre jusqu’au dernier sursaut de la ténèbre dans nos yeux.
Ce n’est pas tant le visage des requins
Que les pieds odorants des falaises
Pas tant l’histoire du séisme
Que l’éboulis poussiéreux de ton rire
Qui m’endort quand des moutons
J’ai bouffé tout le troupeau
Bien des fois nous avons essayé d’en boire jusqu’à la lie l’écœurante clarté, mais le bassin se plaisait à s’emplir de l’effroi de nos yeux ; on nous privait de nos vêtements, de nos cheveux et de nos sentiments qu’il nous fallait abandonner à la gueule froide des vestiaires, nos petits corps devenus moins que des corps ; jetés comme pierres dans une onde aveuglée par le chlore, nous renoncions parfois à toute agitation, n’espérant plus qu’en la caresse amie de l’asphyxie ; même la peau de nos mains se ridait en retour, un seul bain nous faisait centenaires.